Renaissance (15e-16e siècles)

1453. Date repère capitale pour le monde occidental.

Louis XI
Depuis le transport du Dauphiné (1349), il y a eu en France 5 rois, la Guerre de Cent Ans, la Jacquerie, les combats entre Armagnacs et Bourguignons, l'épopée et la mort de Jeanne d'Arc (1431) ...

En 1438, le Dauphin Louis II (qui deviendra le roi Louis XI), est en délicatesse (on dirait maintenant en bisbille) avec son père Charles VII (celui qui n'a rien fait pour sauver Jeanne). Il se souvient qu'il a droit à diriger le Dauphiné. Il fait préparer le terrain en 1441 avec un recensement qui permettra une meilleure assiette de l'impôt (déjà!). Biviers s'y distingue en n'envoyant à la convocation qu'un seul représentant (contre les 250 représentant le mandement [le canton] !). Il y avait pourtant à cette époque environ 95 feux (familles) à Biviers, donc à peu près 500 habitants.

Louis XI réside en Dauphiné de 1445 jusqu'à la mort de son père (1461) ; il s'y fait remarquer par une bonne gestion, mais aussi par ses frasques et diverses aventures. Il a certainement apprécié le château de Montbonnot et ses environs. Des noms locaux restent attachés à sa mémoire : Bouquéron, le chemin de Malanot, la Tour des chiens ... ainsi que celui de la demoiselle Guyette Ourand (pour plus de détails, se reporter à GS). Une anecdote attendrissante pourtant : un soir, à la chasse à l'ours, égaré dans une forêt du Vercors, il est recueilli par un vilain nommé Rigaud qui ne le reconnaît pas et lui offre le gîte et le couvert : au menu, du gibier ... évidemment braconné ! Le lendemain, pour éviter de soumettre son sauveur à la peine encourue (le braconnage étant sévèrement puni), il l'anoblit (1443).

1492
Autre grande date repère : découverte de l'Amérique par Christophe Colomb et première escalade alpine, ascension du Mont-Aiguille grâce à des échelles par 7 soldats dirigés par Antoine de Ville, sur ordre du roi Charles VIII (fils de Louis XI).

Bayard
Pierre Terrail de Bayard est né à Pontcharra vers 1476 et mort en Italie, probablement à Rovasenda (dans le Val Sessia) le 30 avril 1524, mortellement blessé par un tir d'arquebuse. Son histoire nous intéresse à plusieurs titres.

Tout d'abord, c'est l'un des plus grands - et peut-être le plus grand - personnage du Grésivaudan. Ensuite, lorsqu'il exerçait les fonctions de lieutenant général du Dauphiné, il s'est montré si consciencieux qu'il a certainement visité Biviers à ce titre. De plus, il était très lié à la famille d'Arces : liens de sang, liens d'amitié et liens de compagnonnage militaire.
Il n'est pas prouvé que le capitaine d'Ars soit de notre région. C'est sous ses ordres que Bayard apprit à combattre ; plus tard, ils furent collègues dans le commandement des troupes. Ce vaillant capitaine est cité de nombreuses fois par les biographes de Bayard, sans qu'on connaisse ses origines. Par contre, le chevalier Antoine d'Arces, qui accompagna Bayard plus tard au combat, est bien biviérois. Bayard, préparant une expédition en Italie, fait appel à lui alors qu'il venait juste de se marier. On peut même penser qu'il est venu le chercher chez lui.

Enfin, l'histoire de Bayard intéresse Biviers à un autre titre. Pendant environ 50 ans, les seigneurs de Montbives (lignée des Simiane) furent également seigneurs de Bayard, ayant hérité du titre, des droits et même des ruines du château Bayard de Pontcharra.

Une page spéciale est consacrée à Bayard dans ce document (Bayard).

La famille d'Arces
Cette famille a joué un grand rôle dans notre région. Montbives leur a appartenu pendant deux siècles, en particulier au temps de Bayard. Ils ont fait construire Serviantin. Leur ont également appartenu le château de Meylan (appelé la Bâtie à l'époque, sur les ruines actuelles de Château Corbeau), un château (appelé aussi la Bâtie) et la tour d'Arces à Saint-Ismier...

C'est une famille complexe, avec de nombreuses branches, d'aussi nombreuses chutes en quenouille (absence d'héritier mâle) et des résurgences du nom. L'étude généalogique en est difficile.

Plusieurs membres de cette famille seront prieurs de Saint Martin de Miséré. Ils se transmettent même cette fonction d'oncle à neveu. Hugues, puis Jean seront des grands personnages de l'Eglise ; Jean d'Arces sera même cardinal. Il fondera en 1433 l'hôpital de Montbonnot avec l'aide de ses cousins Hugues d'Arces, seigneur de la Bâtie de Meylan et Soffrey d'Arces (branche de St-Ismier), chevalier et, auparavant, bailli de Briançon. Il subsiste encore un bâtiment de cet hôpital, avec une tour, au bord de la Nationale, en face de la poste de Montbonnot.

Un capitaine Louis d'Ars (Arces ?) est constamment cité aux côtés de Bayard par les biographes du chevalier, mais on n'a pas réussi à localiser son origine. Un Antoine de Morard d'Arces, appelé le chevalier blanc, sera également plus tard compagnon d'armes de Bayard en Italie, plus jeune que lui. Ce chevalier, le dernier chevalier errant, a eu une vie mouvementée et pleine d'aventures. Il semble bien que ce soit un biviérois.

On trouvera plus de détails sur la famille d'Arces dans les pages, ou dans les feuilles généalogiques qui leur sont consacrées.

L'église de Biviers
L'église actuelle de Biviers daterait de 1500 environ. Il n'est pas exclu qu'avant cette date elle ait été située plus près du bourg. Jusqu'au déclin du prieuré de Saint-Martin-de-Miséré vers 1650, les offices religieux étaient assurés par un chanoine de ce prieuré, mais il disposait d'un presbytère à Biviers.

Avant la Révolution, c'est devant l'église que se réunissait la communauté le dimanche après la messe, sous la présidence du châtelain et du consul. A la Révolution, elle a vu la bénédiction des armes et des drapeaux révolutionnaires ; elle a été témoin de la prestation de nombreux serments, dont celui du curé. En 1792 (21 décembre), elle a été très endommagée par un ouragan : le toit, les vitraux et même une partie du mobilier...
L'église a sans doute été désaffectée peu après 1794 et remise en service après le rétablissement des cultes (1805). En 1808, elle fait l'objet d'une grande querelle, les 3 communes soeurs étant réunies en une même succursale. Napoléon Ier, à la demande des biviérois, la transformera en une chapelle dépendant de la succursale de Monbonnot. (voir page 19e siècle.)

Elle a subi ensuite différentes modifications : réparations en 1822 (DM 14 avril), réhaussement du choeur en 1829 (DM 10 mai et 6 oct 1831) ; puis du clocher en 1845 (auparavant il était très bas) ; surélévation de 3 mètres pour la nef centrale en 1873 avec adjonction des vitraux supérieurs ; acquisition de deux nouvelles cloches (500 kg et une tonne) en 1883 (DM 15 fév), construction d'un nouveau clocher (DM 4 nov 1883 et mai 1884) ; construction d'un nouveau choeur en 1885 (l'ancien s'étant détaché de la nef, voir article équipements) avec de nouveaux vitraux et une nouvelle sacristie. Le clocher a été rénové en 1956 (DM 29 janv).
Le deux cloches, fabriquées par Paccard, s'appellent respectivement Marie-Louise et Olga (marraine Olga Rallet, fille du maire et épouse du papetier Blanchet de Rives). Une petite cloche du 17e siècle existe toujours au clocher ; il est vraisemblable qu'elle provienne du prieuré de Faissia.

Les guerres de religion
Cette guerre civile, provoquée par l'intolérance religieuse, a été attisée par la rivalité entre deux grandes familles, les Bourbons et les de Guise. La première grande tragédie a eu lieu à Vassy (Haute-Marne) en 1562 (650 protestants massacrés durant leur office par le duc de Guise). Dans notre région, la manifestation la plus désastreuse fut la campagne du baron des Adrets, chef des huguenots, auteur de plus de 4000 meurtres. Il dévasta entre autres le Grésivaudan, puis s'empara de Grenoble (1562), pillant et saccageant églises et couvents, dont le prieuré de Saint-Martin-de-Miséré. La Paix d'Amboise (1563) arrêta pour un temps ces exactions.

La guerre fut rallumée par le massacre des protestants à la Saint-Bartélémy (Paris, 24 août 1572, 30 000 morts au total) . Dans le Dauphiné, les ligueurs (catholiques) appelèrent la Savoie en renfort tandis que François de Bonne prenait la tête des protestants. Celui-ci investit la Mure, puis Moirans, puis les bastions protégeant Grenoble comme les châteaux de Montbonnot et du Cornillon au Fontanil et enfin Grenoble (sans exaction) ; ces derniers châteaux (ainsi que celui de la Bâtie-Meylan), pris par les uns, repris par les autres, furent finalement rasés par les ligueurs, au grand soulagement des habitants. On sait que les succès militaires d'Henri IV et son abjuration du protestantisme en 1593 ramenèrent la paix et, avec Sully, une prospérité que la France n'avait jamais connue.

Lesdiguières
François de Bonne fut nommé par Henri IV duc de Lesdiguières, gouverneur du Dauphiné, puis connétable de France. Il administra sagement la région, fit fortifier et embellir Grenoble, construire différentes demeures dont le château de Vizille ainsi que, pour loger sa maîtresse Marie Vignon, l'hôtel de Franquières à Grenoble (2, rue de Belgrade) vers 1608. Y a-t-il un rapport entre le nom de cet hôtel et celui de notre château ?
Lesdiguières est très probablement venu à Biviers, car il inspectait et renforçait soigneusement les fortifications du Grésivaudan. Les Savoyards continuaient la guerre de religion pour leur propre compte et s'infiltraient dans la vallée dès que Lesdiguières avait le dos tourné.

Fort-Barraux
En particulier, bien que battu aux Mollettes et à Poncharra en 1591, Charles-Emmanuel, duc de Savoie, décidément bien provocateur, entreprend la construction d'un fort en plein territoire français (Barraux, 24 août 1597). Henri IV s'en émeut. Sire, lui dit Lesdiguières, l'emplacement de ce fort est particulièrement bien choisi, mais en raison de l'état des finances du royaume il me semble préférable que ce soit votre cousin de Savoie qui en fasse la dépense. Quand il sera à peu près terminé, mais avant d'être équipé d'une garnison sérieuse, je le prendrai. Ce qu'il fit en une nuit le 15 mars 1598. Le fort, remanié ensuite par Vauban, a résisté à tous les autres assauts. Sous Louis XIV, le régiment de Carignan l'a occupé avant de partir au Canada et d'y faire souche (beaucoup de nos cousins québécois descendent de ce régiment). Le fort a servi ensuite de prison sous différents régimes (dont celui de Vichy) : Barnave y a été enfermé 13 mois avant d'être guillotiné en 1793. Ce fort existe toujours et peut se visiter un jour par mois : chapelle, très belle salle d'armes, puits à cage d'écureuil...

Début des archives de Biviers
Les registres paroissiaux, qui servaient avant la Révolution de registres d'état-civil, remontent à 1582 en ce qui concerne Biviers. Il est donc probable que les précédents ont été détruits pendant les guerres de religion. Ils mentionneraient une grande famine sous Louis XIV à Biviers.
Les registres des délibérations municipales ne remontent qu'à 1738 (on notera DM la référence à ces délibérations ; elles vont nous servir de fil conducteur).

Quant aux livres terriers ou parcellaires, ils décrivent les parcelles de terrain pour chaque propriétaire, essentiellement dans un but fiscal. L'un d'entre eux (dénombrement des fonds nobles et ecclésiastiques de la communauté de Biviers et territoire taillable de Biviers) remonte à 1634 ; deux autres (parcellaire du territoire taillable du mandement de Biviers, et Partitaire) datent de 1663 (noter qu'on parle bien du mandement de Biviers). Le plus ancien, non daté, semble bien antérieur pour diverses raisons (paléographie difficile à lire, non correspondance entre les noms des habitants et ceux de 1634). Nous utiliserons ces livres terriers dans la page suivante (17-18e siècle) pour décrire l'ancien découpage de notre territoire. En attendant, on peut examiner ci-après un échantillon de ce livre décrivant un des lopins du sieur Collin, avec, en face, son interprétation, puis sa signification.

Balthazard Collin
Au mas des mendards une
pièce de vigne contenant huit
cent soixante cinq toises
confronte le rif de Corbonon
de bize sieur A... Janoz
du vent et de roche le chemin
des mendards de l'ysère Montant
.......... 3 q ½ 1 civ 22 tz

(Fonds de) Balthazard Collin.

Au hameau des Mendards, une
parcelle de vigne. Surface :
865 toises carrées.
Jouxte le torrent de Corbonne
au nord-est, (un fonds du) sieur A... Janoz
au sud-ouest et nord-ouest, le chemin
des Mendards au sud-est. Report :
3,5 quartelées, 1 civerée, 22 toises.

Note : 1 toise carrée = 4,186 m²
1 sétérée = 900 toises carrées
= 4 quartelées = 16 civerées

(en Grésivaudan)
(Pour une image plus détaillée (130 K) cliquez ici)


Histoire Moyen-Age 17-18e siècles

Pour plus d'informations :
Regards sur Montbonnot et St-Martin-de-Miséré, par Georges Sailler
Un monument en péril, Fort-Barraux, François Lesbros, Bull. Acad. Delph., 1996, 8, p. 1549