Bayard

Pierre Terrail de Bayard, né à Pontcharra vers 1475, est mort en Italie, probablement à Rovasenda (dans le Val Sessia) le 30 avril 1524, mortellement blessé par une décharge d'arquebuse. Bien que son grand-père et son père aient été gravement blessés eux aussi dans des combats pour le roi de France, il était considéré comme issu de petite noblesse (ses ancêtres n'avaient pas participé aux croisades ! Cf. généalogie de Bayard , tableau pdf ).

Son histoire nous est connue par des citations dans les chroniques officielles françaises et italiennes, mais surtout par ses trois premiers biographes : le Loyal Serviteur (auteur anonyme, probablement Jacques de Mailles, qui fut son secrétaire et écrivit en 1527), Symphorien Champier (un lointain cousin, médecin militaire en Italie, oeuvre parue dès 1525) et enfin, un lettré grenoblois, Claude Expilly, un siècle après les faits. Il ne s'agit sans doute pas là d'ouvrages historiques au sens actuel ; ils comportent des lacunes, des inexactitudes et parfois des embellissements comme l'a montré vers 1970 l'érudit Camille Monnet.

Bayard est devenu page en 1486 à la cour du duc de Savoie, peut-être à l'âge de 12 ans, puis, 4 ans après, à celle du comte de Ligny ; il entre ensuite dans sa compagnie d'hommes d'armes, stationnée en Picardie, pour apprendre le métier. Excellent cavalier, il participe très jeune et avec brio, à de nombreux tournois (le premier ayant eu lieu à Lyon, sans doute en 1492, où Bayard s'équipe, bon gré, mal gré, aux frais de son cousin, abbé d'Ainay). En 1494, commencent les guerres d'Italie où il s'illustrera : il a à peine 20 ans.

Sa vaillance et ses exploits lui valent d'obtenir le grade de lieutenant, puis de capitaine, ce dernier habituellement réservé aux grands du royaume. Sous trois rois (Charles VIII, Louis XII, François Ier), il participe aux campagnes d'Italie contre les Impériaux (empire germanique, espagnols, certains états italiens, mercenaires suisses) ainsi qu'à la défense du pays par deux fois envahi. Il a été maintes fois blessé, dont deux très gravement, et fait prisonnier deux fois, semble-t-il. La première fois, à Milan en 1500, poursuivant seul une troupe, il pénètre à sa suite dans la ville ennemie ! L'action était tellement téméraire que le potentat du lieu (Ludovic le More) le libère immédiatement sans conditions, lui rendant même son cheval et ses armes. On est entre chevaliers ou pas ! La seconde fois, à Guinegatte (1513), toujours trop téméraire, il est pris par les Bourguignons et Louis XII paye sa rançon.

La légende a retenu parmi ses exploits : sa défense solitaire du pont de Garigliano, son duel contre le héros espagnol Sotomayor, le combat des 13, sa défense de Mézières assiégée, mais aussi son mépris pour l'argent, son refus du pillage, du viol et des butins de guerre, la noblesse de son comportement envers ses hôtes à Brescia... Sa vaillance et son esprit chevaleresque lui ont valu l'honneur insigne d'adouber (de faire chevalier) le roi François Ier à sa demande sur le champ de bataille, au soir de la victoire de Marignan en 1515. Sa mort même a été exemplaire : la colonne vertébrale brisée, il agonise dans le camp adverse, respecté et pleuré par ses ennemis et plus soucieux de son âme que de sa blessure.
Il est considéré comme l'un des derniers chevaliers et, même, par certains, comme un chevalier du Moyen-Age égaré en pleine Renaissance.

Bayard a été nommé en 1515 lieutenant général du Dauphiné, c'est-à-dire adjoint d'un grand seigneur, le Gouverneur du Dauphiné, presque toujours absent de sa province. Il s'est occupé de sa charge administrative avec beaucoup de compétence et d'humanité. Il était, semble-t-il, vénéré par ses compatriotes. Il a parcouru son domaine, courant sus aux brigands et s'occupant même des épidémies. Il devait également entretenir des rapports étroits avec la noblesse du Dauphiné, auprès de qui il lui fallait recruter des troupes pour le service du roi en Italie. On sait qu'Antoine d'Arces a été pour lui un compagnon d'armes dans ses dernières batailles.

Bayard ne s'est pas marié, mais a laissé une fille, Jeanne, dont on ne connaît pas la mère. Il a reconnu cette fille et a voulu préparer son mariage en lui constituant une dot. Jeanne s'est mariée en 1525 (un an après la mort de son père) à Antoine de Bocsozel ; veuve 7 ans après, elle a eu 5 enfants. Il lui aura fallu 23 ans de procès et l'intervention du roi Henri II en 1548 pour entrer en possession des biens dont son père l'avait dotée (la propriété de ces biens lui était contestée par la famille Rabot, des magistrats grenoblois).
L'un des cinq petits-fils de Bayard, Piraud de Bocsozel, né en 1529, suivra les traces de son cousin Antoine d'Arces. Lui aussi grand voyageur un peu en retard sur son temps, poète troubadour, il sera amoureux de la reine d'Ecosse. Il se croyait peut-être encore au temps de l'amour courtois et de l'asag : par deux fois, il se cachera un soir sous le lit de la reine ; la première fois, on pardonna l'audace du troubadour ; la seconde fois, il eut la tête tranchée (1563). Nos amis écossais avaient décidément la hache facile!

Généalogie de Bayard (tableau pdf) cliquez ici


Le chevalier Bayard est sans doute né et a passé son enfance dans le château qu'à fait construire son arrière-grand-père à Pontcharra, lieu dit Bayard. Après la mort du chevalier, le château passa aux mains de son frère Georges, puis dans celles de la fille de Georges, Françoise, épouse Copier. Elle n'eut pas d'enfant et vendit château et titres en 1559 à un d'Avançon, marié à une fille Alleman ; de cette famille, les droits passèrent par mariage aux Simiane de Gordes (1581), puis aux Simiane de la Coste (1677), seigneurs de Montbives et, enfin, aux Noinville (1735).

Louis-Alphonse de Noinville, émigré sous la Révolution, fut le dernier seigneur de Bayard. Ses biens furent saisis et vendus en 1795. Le château était en ruines depuis longtemps (probablement depuis Françoise Copier). Ses pierres servirent même de matériau de construction alentour, malgré les protestations de quelques érudits dauphinois. En 1865, le curé de Grignon, Jean-Baptiste Bertrand, s'y aménage une demeure pour sa retraite en réparant au mieux une partie de la bâtisse, avec l'aide du propriétaire légal. Le château est actuellement propriété privée. On le distingue facilement depuis la vallée, au sud de Pontcharra (ne pas le confondre avec l'élégante tour d'Avallon, située plus haut, un kilomètre environ au nord-est). Pour le visiter, s'adresser au syndicat d'initiatives de Pontcharra.

On poura consulter le site historique consacré au chevalier Bayard.


Ouvrages complémentaires :
Bayard, Jean Jacquart, éd. Fayard, 1987.
La fille cachée de Bayard, Jeanne Terrail de Bocsozel, André Baroz, éd. d'auteur, 1996.
Une famille de hauts magistrats grenoblois, les Rabot, André Baroz, éd. d'auteur, 2000.
Les maisons fortes du Dauphiné, J-J-A Pilot, éd. Drevet, Grenoble.
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