Ermitage de Faissia
On prétend que Saint Bruno et ses compagnons auraient, dans un premier temps, occupé cet endroit exigu avant de s'installer à Casalibus et qu'ensuite, Saint Eynard, leur contemporain et ami, l'aurait choisi pour ermitage.
Un acte de 1244 réglemente les relations et redevances entre le prieuré de Faissia et l'évêché de Grenoble. Les taxes et dîmes sont prélevées sur les laboureurs de Corenc. L'accord est confirmé en 1251 par le dauphin Guigues le Jeune. Il semble que ce prieuré ait été rattaché à celui de St Michel de Connexe (sans doute l'actuel St Michel de Connest au sud de Champ sur Drac) et donc à l'ordre des bénédictins, ainsi qu'en témoignent des archives de 1494 (les visites) de Laurent Alleman, évêque de Grenoble (et oncle de Bayard).
Malgré tout, ce monastère reste très pauvre et très isolé. Il est déclaré abandonné et complètement en ruines lors d'une visite en 1578 du prieur de St Michel de Connexe. Ce dernier met alors le site en vente ainsi que les domaines rattachés ; ils sont situés surtout à Corenc, mais on y mentionne un bois allant du lieu de Collaix (?) jusqu'au-dessus de la paroisse de Buviers (sic). L'acheteur sera Félicien Boffin, avocat et conseiller au parlement (août 1578).
Son héritier, Thomas Boffin, conseiller d'état et seigneur d'Uriage, veut relancer l'ermitage et fait reconstruire les bâtiments. Un prêtre vertueux et épris de solitude, Jacques Magnin, s'y installe, mais, apparemment, il n'a pas de successeurs. Les Récollets de Grenoble (des franciscains ?), trouvant l'endroit propice à leur spiritualité, se font alors attribuer le prieuré par Thomas Boffin, qui s'engage à en entretenir les bâtiments (1615).
La règle suivie par ces religieux est très stricte : carême la moitié de l'année (pas de viande), nourriture réduite le reste du temps, journées entièrement consacrées à la prière, aux offices et à la méditation. Les visites sont très réglementées (malgré tout, il semble qu'on y allait à cheval !). Pendant une grande partie de l'hiver, la neige bloquait le prieuré. Les moines devaient se contenter de morceaux de pain recueillis auparavant en demandant l'aumône de porte en porte et séchés au soleil ou devant le feu. Un certain frère Léonard se fait remarquer par son ascétisme, son abnégation et – on dirait maintenant – son charisme. Il est mort en 1628 et enterré sur place.
En 1655, un certain Alphonse Simiane de la Coste (tiens, tiens, un cousin de nos seigneurs biviérois !), prieur de St Michel de Connexe, conteste la vente au profit de Boffin et veut chasser les Récollets. Mais Félicien Boffin avait à l'époque pris la précaution d'obtenir l'aval du Pape ! En 1656, pour éviter un procès mal parti, on transigea : on cède aux requérants des dîmes et des redevances, les Récollets gardent le prieuré et le Pape aurait encore une fois approuvé.
La dernière mention concernant ce prieuré date de 1670. Son supérieur s'appelle alors Jacques Arbaleste ; il assiste à une cérémonie à l'ancienne abbaye des Ayes. Au milieu du 18e siècle, l'endroit paraissait abandonné. La cloche de sa chapelle, datant de 1670, se trouve encore au clocher de l'église de Biviers. L'endroit a été ravagé par un incendie peu avant la Révolution, par suite de la maladresse de charbonniers. L'emplacement a été vendu comme bien national en 1792.