Formation des continents

Ou : la science dépasse la fiction

Il y a peut-être 500 Ma (millions d'années), il existait l'océan et deux supercontinents, la Laurasie au nord et le Gondwana au sud. Mal ancrés sur le manteau visqueux, le magma, ces continents dérivent l'un vers l'autre et finissent par se télescoper. Sous le choc, il se plissent et donnent naissance en Laurasie à une énorme chaîne de montagnes, le massif hercynien, dont on retrouve des traces aussi bien dans les Appalaches que dans le Caucase, et bien sûr, dans la majeure partie de l'Ouest européen (Espagne, France...) dont Belledonne. Cette chaîne s'élevait peut-être jusqu'à 10 km. Pendant 300 Ma, l'érosion la rabotera tellement qu'elle deviendra une pénéplaine. L'Europe était alors à peu près sous l'équateur. La chaleur et l'humidité aidant, une végétation abondante recouvrira ces terres. La mer primitive, la Thétys, inondera une grande partie de ces vieux continents usés par le temps. Parfois, l'eau engloutira d'immenses forêts dont le bois, décomposé, donnera naissance aux gisements de charbon (époque du Carbonifère, fin de l'ère primaire). La plupart de ces mers, à demi comblées par les alluvions, sont peu profondes (lagunes).

Vers -200 Ma (début de l'ère secondaire), le continent unique, la Pangée, se disloque en 5 ou 6 plaques qui dérivent chacune de leur côté en direction de la position des continents actuels, à une vitesse de quelques centimètres par an. Malgré tout, c'est une époque calme, chaude et humide. Les animaux se développent, d'abord dans les mers, où des milliards de crustacés minuscules laisseront leur carapaces former des bancs calcaires au fond de l'eau, parmi les autres sédiments. C'est à cette époque que se forment les roches de la Chartreuse.


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Des mollusques, mal décomposés, ont souvent laissé leur empreinte dans ces roches, comme les ammonites. De gros reptiles, certains proches des poissons comme l'ichtyosaure, hanteront les mers et leurs rivages. Dans les terres émergées, ces reptiles deviendront parfois énormes : c'est l'époque des dinosaures.

Les couches provenant de cette époque sont toutes stratifiées (exemple, celles de la falaise inférieure du Saint-Eynard). Dans chaque strate, on trouve une couche très calcaire, puis une couche plus argileuse, appelée marne. Or récemment, en datant ces couches, on a constaté que, partout sur Terre, elles avaient les mêmes différences d'âge. Chaque strate s'est formée sur environ 20 000 ans. Comment peut-on l'expliquer ? Les restes calcaires des carapaces d'origine animale se mélangent dans la mer aux sédiments argileux provenant de l'érosion. L'apport argileux serait pratiquement constant. Par contre le dépôt calcaire dépend de l'abondance des animaux marins, lequel dépend de la densité de leur nourriture, le plancton, qui lui-même dépend de l'ensoleillement ... Or la mécanique céleste nous apprend que l'axe de la Terre décrit un cône, comme celui d'une toupie, avec une périodicité de 21 000 ans (angle du cône 23,27°). Ce phénomène de précession des équinoxes en modifiant périodiquement le climat pourrait être à l'origine de la stratification des bancs argilo-calcaires formés par sédimentation au temps du Séquanien, avec une vitesse d'un à trois millimètres par siècle.

Peu après, toujours à l'ère secondaire, vers -140 Ma, sur des hauts fonds marins maintenant, se développent des coraux, dont les débris finissent par s'écrouler dans les mers plus profondes au-dessus de nos strates séquaniennes. Il s'agit d'apports plus massifs qui rendraient compte de la grande compacité des roches calcaires du Tithonique ou de l'Urgonien. Les roches de cette époque contiennent des fossiles marins de grande taille appelés rudistes (on peut en voir facilement sur les murs des quais de l'Isère à Grenoble).

Vers -65 000 ans (ère tertiaire), la plaque africaine dérive à nouveau vers l'Eurasie ; finalement elle la télescope, leurs bords se broient et se chevauchent. Sous l'effet de ces énormes pressions, les continents se plissent à nouveau. Chez nous surgissent les Alpes, dont le coeur s'élève peut-être jusqu'à 11 km ; l'érosion débarrassera les plus hauts sommets de leur revêtement secondaire, épais parfois de 8000 mètres, et mettra à nu le socle hercynien primitif (gneiss et granites). En Chartreuse (et dans les autres massifs des Pré-Alpes), la poussée est moins forte et les montagnes resteront recouvertes des couches calcaires de la Thétys. Le climat s'est déjà refroidi ; les conditions de la vie se sont modifiées et les dinosaures ont disparu.

L'ère quaternaire verra alterner des périodes chaudes et froides, si froides que des glaciers recouvriront une grande partie de l'Europe. Ce sera le cas dans la vallée du Grésivaudan, par deux fois au moins. Ces glaciers creuseront les vallées en forme d'auge ou d'U et pousseront devant eux sédiments et moraines. Quand le climat se réchauffe, l'eau de fonte est emprisonnée par la moraine et forme un lac, où se déposent des alluvions. Le dernier lac du Grésivaudan fait céder sa moraine (dans les Terres Froides) vers -3000 et se vide dans le Rhône. Il en restera l'Isère et la vallée du Grésivaudan, aux alluvions fertiles.

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